Élections 2022
Publié le 16 septembre 2022 access_time 5 minutesRetour sur Le grand débat sur la culture
Un compte rendu de David Lamarre
La campagne électorale provinciale a donné lieu au Grand débat sur la culture, présenté par le Réseau des conseils régionaux de la culture du Québec en partenariat avec la Chaire de gestion des arts Carmelle et Rémi-Marcoux HEC Montréal, le 9 septembre dernier.
Ce fut l’occasion d’en apprendre davantage sur les positions que défendent les candidat.e.s Frantz Benjamin (Parti libéral du Québec, Viau), Ruba Ghazal (Québec Solidaire, Mercier), Pierre Nantel (Parti Québécois, Marie Victorin) et Nathalie Roy (Coalition avenir Québec, Montarville).
Animé par Sylvain Massé, l’événement était présenté devant public à l’auditorium de HEC Montréal et diffusé simultanément en ligne.
La découvrabilité et les GAFAM
Sans contredit, l’un des sujets chauds du jour s’avéra être l’impact des géants du numérique sur la culture québécoise.
Pour Pierre Nantel du Parti Québécois, il s’agit là de la principale raison pour laquelle il s’est lancé en politique. « Les enjeux culturels québécois ne sont pas bien servis au sein du Canada. C’est épouvantable à quel point on disparaît de nos écrans », s’inquiète-t-il. Il propose à cet effet une solution : « on doit avoir un CRTC québécois et un bureau de la promotion de la culture en ligne. »
Ruba Ghazal, de Québec solidaire, abonde dans le même sens. Elle souhaite « mettre au pas les GAFAM », quitte à « changer les lois pour les assujettir ». Elle insiste aussi sur l’importance d’établir une « politique de la découvrabilité ».
Une opinion que partage le poète et député libéral Frantz Benjamin. Il suggère la création d’un « nouveau fonds destiné à la culture et aux médias ». Celui-ci serait « financé par l’imposition d’une taxe temporaire de 3 % sur le chiffre d’affaires des géants du numérique ».
Pour la ministre de la Culture et des Communications Nathalie Roy, « la promotion, c’est le nerf de la guerre ». À cet égard, elle cite en exemple les subventions accordées pour rendre possible la récente campagne publicitaire promouvant la rentrée théâtrale. Elle rappelle également que le gouvernement de la CAQ a instauré le Secrétariat à la promotion de la culture québécoise.
Les Espaces bleus
La création du réseau des Espaces bleus, annoncée en juin dernier, a aussi donné lieu à une discussion animée.
Pierre Nantel remet en doute le bien-fondé de cet éventuel réseau de lieux culturels et patrimoniaux. « Les espaces bleus : où est le manuel d’instruction de cette soucoupe volante ? Ça sort d’où et qui a demandé ça ? », s’interroge-t-il.
Une question qui préoccupe aussi Frantz Benjamin. Il rappelle qu’il y a « une quinzaine d’années, le réseau des musées faisait état de leur précarité. Il n’avait pas besoin d’un réseau parallèle pour lui faire compétition ».
Sans nécessairement vouloir sabrer ce projet, Ruba Ghazal déplore le « [manque de] consultations en amont. Il faut faire les choses dans le bon ordre pour ne pas faire peur à tout le monde ».
Ces inquiétudes sont injustifiées à en croire Nathalie Roy. « Les Espaces bleus se veulent des espaces de collaborations, explique-t-elle. Ils se veulent complémentaires aux musées déjà en place. Nous avons bonifié les subventions à tous les musées que nous soutenons. ».
La diversité des publics
La participation du public aux activités culturelles québécoises a aussi été au cœur des discussions.
Frantz Benjamin insiste sur l’importance d’avoir une approche inclusive : « on ne peut pas se permettre de laisser tomber un Québécois quand on parle d’accès à la culture. On doit s’adresser à toutes les clientèles. »
Dans cette optique, les représentant.e.s de Québec solidaire et du Parti Québécois ont des propositions similaires, soit offrir aux nouveaux.les arrivant.e.s dans la province des sommes ou des bons échangeables contre des produits culturels comme des billets de spectacle, de théâtre ou de cinéma afin qu’ils se familiarisent avec les artistes d’ici.
Pour Nathalie Roy, la clientèle la plus importante à viser demeure les tout-petits. Elle souligne que le gouvernement de la CAQ offre déjà « deux sorties culturelles gratuites par année pour les élèves. C’est un programme de 110 millions de dollars ». Ruba Ghazal s’aventure encore plus loin en proposant « quatre sorties par an pour les élèves du primaire et du secondaire ».
À l’inverse des sorties, Benjamin Frantz et Pierre Nantel suggèrent de faire entrer des intervenant.es culturels dans les écoles. Le premier aimerait intégrer un.e conseiller.ère pédagogique culturel dans tous les établissements scolaires alors que le second souhaite que les artistes offrent des classes de maître aux élèves du primaire et du secondaire.
Le budget de la SODEC et du CALQ
L’enjeu de la consolidation des budgets de la SODEC et du CALQ a aussi été abordé. Les ressources qui ont été allouées à ces deux organismes en raison de la crise sanitaire seront-elles maintenues au cours des prochaines années ?
« Un grand oui, tout simplement », offre comme réponse Benjamin Frantz.
« Si le passé est garant de l’avenir, oui », confirme à son tour Nathalie Roy avant de rappeler les augmentations de budget de 52 % pour le CALQ et de 143 % pour la SODEC qui sont survenues lors du dernier mandat de la CAQ.
Pierre Nantel affirme quant à lui qu’il « faudra continuer à soutenir [le milieu culturel], encore plus que jamais, en dehors du contexte pandémique ».
Ruba Ghazal s’engage même à augmenter ces budgets, avant de préciser : « ce qui est très important, il faut que l’argent se rende aux artistes, aux créateurs à la base. »
Le Plan culturel numérique du Québec
Les invité.e.s ont aussi dû répondre à la question : « Comptez-vous reconduire le Plan culturel numérique du Québec après 2023 ? »
« Oui, le numérique c’est extrêmement important », s’engage sans équivoque Ruba Ghazal.
Nathalie Roy propose quant à elle de le « réaménager » en précisant qu’il y a « des bonnes choses là-dedans (…) notamment les ADN — agents de développement culturel numériques ». Elle confirme aussi qu’une réflexion est en cours pour tout ce qui touche les industries culturelles créatives.
Benjamin Frantz désire également ajuster le plan, mais pour « renforcer l’usage du français dans le numérique au Québec ». Une position que soutient sans réserve Pierre Nantel.
Aux urnes le 3 octobre
En guise de conclusion, soulignons que malgré la chaude lutte qui se dessine au scrutin, les échanges entre les candidat.es n’ont jamais sombré dans la joute oratoire ou pire, l’acrimonie. Chacun.e parlait à son tour, demeurait attentif aux réponses des autres et se conformait aux directives de l’animateur Sylvain Massé. Si bien que, pour le plus grand plaisir des gens réunis sur place et en ligne, le respect entre les différent.e.s intervenant.e.s était palpable.
Les élections provinciales auront lieu le 3 octobre prochain.
Vous pouvez visionner Le grand débat sur la culture dans son intégralité sur Facebook.